dimanche, novembre 22, 2009

Téléthonesque

Pierre Bergé l'argentier gauchisant mais pas trop, disons modemo-socialo-démocratico-recentré a cru de bon ton (politiquement incorrect, viens là que je prends le contrepied de ce que la majorité pense c'est réthoriquement confortable et médiatiquement bankable) de pourrir le Téléthon.
En myopathe il s'est senti légitime d'en discuter, alors en bon porteur d'une maladie neuro-dégénérative je vais aussi exprimer ma légitimité à dire n'importe quoi de manière poltiquement incorrecte aussi.

Je tiens aussi à préciser que j'ai eu de bons copains myopathes mais que eux en sont morts (pas d'avoir copiné avec moi mais de la myopathie de Duchesne), et voilà je vous fais le coup du je suis pas raciste je connais même des noirs.
Bref, le Téléthon me choque aussi car :
- le regard sur le handicap n'a pas changé depuis que mes copains et moi -même avions à le subir à chaque sortie parmi les gens bien normaux. C'était il y'a une trentaine d'années et voir qu'aucun progrès n'a été fait me révolte. Le téléthon c'est un peu une handi-pride, mais bordel de merde, les handicapés ne sont pas une communauté et les voir traiter de la sorte. Bref, ce spectacle télévisuel pour bisounours me donne envie de gerber. Quand tu rentres avec tes potes, toi en fauteuil, en béquilles ou en boitant très fortement, cassé, abimé par une biologie que t'as pas choisi, dans un bar pour boire une bière tranquille et que tu sens les regards de ces autres sur ton corps tu sais que te faire accepter autrement que par de la pitié ça va être la guerre. Alors merde à cette pitié télévisuelle.
- le fric donné pourrait l'être via l'impôt. Tu comprends que "Fraternité" c'est pour le bourgeois en bonne santé, pour Total, pour le haut fonctionnaire...renflouer les banques ça oui. Démago, facile à dire pour l'éditorialiste qui se pense responsable mais qui n'est qu'un planqué de plus comme je le suis désormais.

Mais ce que Pierre Bergé ne dit pas ou minore c'est que l'argent du Téléthon arrive dans les cliniques, que les gamins ont des fauteuils neufs, que des chercheurs ont des financements pour leurs travaux. Qu'il y a des familles et des enfants qui un week-end aiment à croire qu'on pense à eux et qu'autre chose est possible et c'est bien, oui juste ça si ça les aide à vivre mieux c'est bien. Le regard des autres sur soi, c'est intime et tout le monde ne le vit pas comme de la pitié, comme je l'ai vécu petit.
Moi les soirs du Téléthon j'ai mal et je ne veux pas voir ce spectacle, ça me renvoie à des déchirures profondes et j'ai envie de crier ma rage.
Alors tant que la société se contentera de l'aumône pour se caresser l'égo plutôt que du faire du politique, le Téléthon sera là et pour les familles et les gamins malades qui y participent je ne cracherai pas complètement dessus. C'est tellement facile quand on est au dessus de la mélée, au-dessus jusqu'à la chute finale n'est-ce-pas?
Tiens encore une saloperie démagogique j'aimerais que l'ami de Ségolène et Vincent aille parler en myopathe de tout le mal qu'il pense du Téléthon droit dans les yeux de parents qui voient tous les jours sombrer leur fille ou leur fils.
Il y a quinze ans j'ai vu le sourire d'un petit marsellais qui avait eu enfin un fauteuil électrique neuf grâce aux associations qui travaillent avec le fric du Téléthon, et il m'avait expliqué combien c'était important pour lui et combien il n'était pas d'accord avec ma vision négative de cet évènement, alors juste pour ça je m'arrête là.

Correspondances

Merci Maloriel pour ton message sur Giono sur ton blog. Moi aussi j'aimerai vous faire partager quelques citations de Jean Giono :
"La raison et la logique, c'est pour les temps ordinaires."
"Les spéculations purement intellectuelles dépouillent l'univers de son manteau sacré."
"Un homme ne va jamais plus loin que lorsqu'il ignore il va."
"Les hommes sont les êtres les plus faibles du monde parce qu'ils sont intelligents. L'intelligence est exactement l'art de perdre de vue."

J'aime passionnément l'oeuvre de Giono. Chaque fois des images de mon enfance et de mon pays remontent à la surface à l'évocation de la trilogie de Pan. : mon pays imaginaire, celui qui est perdu aussi, celui de mon enfance, des collines et des montagnes de la haute provence, de ce pays dur aux hommes, de cette terre peu généreuse dont chaque fruit se mérite.
Jean Giono n'est pas un écrivain régional il nous parle de notre rapport à la nature, à l'univers, son oeuvre prend racine dans la vie difficile des paysans et dans leurs relations primitives et mystiques (cosmiques) à la terre. J'ai eu la chance de grandir dans cette Provence avec les vieux paysans, les derniers bergers. J'ai vu l'amour et le respect pour le sol, je l'ai appris grâce à mon grand-père. Ces vieux c'étaient des écolos primitifs, pas de ces alters ni des décroissants, tout ça n'avait pas de sens à l'époque. Combien de fois, en jeune con bien rationnel (un mot prétentieux pour masquer l'ignorance), ai-je soupiré ou ri à leurs alarmes sur la nature qui souffre et qui ne répond plus comme avant.
Oui mais ces vieux comme les paysans de Giono savaient lire un peu de ce que la nature nous révèle, au bruit du vent, à la couleur du ciel ou au chant des oiseaux. C'est un savoir universel que ce savoir paysan, il a ses superstitions, mais la science a ses dogmes aussi. Ce savoir a disparu dans notre monde occidental trop sûr de sa technologie.
Alors maladroitement certains plus sensibles ont compris que pour eux l'identité elle n'était pas nationale mais elle était au coeur du monde et du cosmos dans ce rapport intime à l'univers, cette identité elle se construit comme le paysan qui creuse son sillon et change comme les saisons passent.

Merci Giono de nous à rappeler le bonheur d'être des enfants de la terre, notre devoir de liberté absolue loin des nationalismes et des héroismes à la con, notre devoir d'humilité face au cosmos, merci pour la poésie, pour le pays, pour ces collines.

Et désolé pour ce message prétentieux.

Bactracio ergo sum

Rions ensemble avec ce magnifique extrait du document du ministère
de l'éducation nationale sur la réforme de la formation et du recrutement
des enseignants :

....épreuve durant laquelle il faudra tester la compétence
"agir en fonctionnaire de l'Etat et de façon éthique et responsable"

Etonnish non? J'ai imaginé quelques questions à poser aux candidat(es) sous
forme d'un qcm :


a) Tenue vestimentaire acceptable
1) String
2) Voile
3) Burqua
4) Uniforme

b) Vous découvrez qu'un de vos élèves est un dangereux sans-papier
1) courageusement vous lui bottez le cul
2) téléphonez à la préfecture
3) choisissez le camp du terrorisme et ne faites rien

c) Albert Camus
1) Indécrottable libertaire
2) Immense écrivain qui a su si bien chanter les plages de la regrettée
Algérie française

3) coooooooool lol

d) le sexe
1) en classe c'est mal
2) en classe c'est sale
3) en Thailande c'est mieux

e) la France
1) tu l'aimes et tu fermes ta gueule
2) se reporter au manuel pour la définition du ministère de l'identité
nationale

3) ????

f) la liberté
1) l'imposer à l'humanité entière est une nécessité pour notre
croissance

2) ou le charter
3) est un droit
4) est un devoir

jeudi, novembre 19, 2009

Journée de merde

Pour mon retour sur ce blog, j'avais prévu de répondre à Maloriel et à son message sur J. Giono qui est l'un de mes auteurs favoris et patatras!
Ce soir j'apprends que Sarkozy veut panthéoniser Albert Camus. Je ne voulais pas parler de politique car depuis des mois je ne fais que ça ici et ça me fait gerber.
Alors que je passe mon temps à enseigner et à faire des maths, à explorer de nouveaux espaces, que j'aimerais parler de musique aussi de groupes comme Antic Clay ou Missoury qui font une country très sombre ou de groupes de black metal comme Lurker of chalice ou A forest of stars, mes messages sur ce blog tournent autour du même thème.

Désolé c'est plus fort que moi, donc vous le savez j'aime A. Camus, une écriture simple, une philosophie modeste pour certains, malgré les apparences simplistes il a construit un système de pensée prolongeant la réflexion de Nietzche et rompant avec le marxisme béat des intellectuels de son époque. La lecture de l'homme révolté m'a changé. A. Camus représente pour moi un encouragement à poursuivre le combat au quotidien, avec l'exigence permanente de l'autocritique et de la responsabilité. Un constat : l'absurde, une solution : la révolte mais pas le nihilisme, pas la barbarie.

La lecture de Camus m'a construit idéologiquement, sa pensée ce que j'en ai tiré de valeurs et de problématiques ne peut me faire que farouche opposant au régime en place au régime des partis, libertaire avant tout. Sarkozy est à l'image de notre société, oui je la pense monstrueuse, elle récupère tout, notre colère, jusqu'à nos révoltes, et elle exploite nos héros jusque dans leur mort de Jaurès, Mocquet à Camus. Un jour ils citeront, reprendront Debord et Foucault, pas de limite dans l'indécence intellectuelle.
Peu importe les actes, débattre de l'identité nationale et envoyer Camus au panthéon ils ne voient pas ce que celà a de contradictoire. Tout est slogan, tout est publicitaire.

Il y a une dizaine d'années, je passais à Lourmarin dans le Vaucluse pour y visiter son chateau, à côté il y a un petit cimetière très provençal, un endroit tranquille et je me suis rendu sur les tombes d'Henri Bosco et d'Albert Camus. C'est con, c'était important pour moi, une manière de dire merci à ces deux écrivains qui m'avaient tant donné, loin de toute idolatrie.
La tombe de Camus est simple, discrète, pas de pierre tombale, des plantes poussent dessus, il est là dans le sud dont il a toujours été l'enfant chéri et c'est bien.

Voilà le penser à Paris dans ce bâtiment pompeux, célébré par des gens dont il est à l'antipode....